#5 - Notre đ§ est une fabrique Ă infox
DĂ©couvre les clĂ©s pour ne pas crĂ©er toi mĂȘme de la mĂ©sinformation en santĂ©.
Bonjour Ă tous!
Bienvenue dans cette cinquiÚme édition.
Vous ĂȘtes plus de 1200 Ă recevoir cet email, merci pour votre confiance đđŒâșïž
Les avancĂ©es des modĂšles IA vont tellement vite ces derniers temps quâil est difficile de suivre.
Une chose est sĂ»re: Il nâa jamais Ă©tĂ© aussi simple de crĂ©er et diffuser de lâinfox en santĂ© sur les rĂ©seaux.

Que le crĂ©ateur ait ou pas de mauvaises intentions (voir lâĂ©dition #1 pour les dĂ©finitions), le fait est que les infox sont aujourdâhui créées en deux clics, dans une forme et un style hyper convaincants.
Le challenge aujourdâhui nâest donc plus de crĂ©er de lâinfox, mais trouver un moyen de freiner sa diffusion.
Oui jâai dit freiner⊠car lâarrĂȘter est pour ainsi dire⊠impossible
Câest notre sujet du jour âŹïž
đŻ Au sommaire :
Aujourdâhui nous allons nous pencher sur une question perturbante:
Pourquoi les infox continuent-elles Ă autant circuler en ligne , alors que lâon a de plus en plus conscience de leur existence?
Spoiler đš :
Lâinfox joue avec nos cerveaux, et nos cerveaux adorent ça!
Pour y voir plus clair, je vais vous expliquer:
pourquoi nous sommes tellement attirĂ©s par les fake-news đ§
comment les rĂ©seaux sociaux priorisent la mĂ©sinformation đ±
comment lâeffet carotte nous transforme en crĂ©ateurs dâinfox đ„
Pour finir, quelles sont les clĂ©s đ pour mettre en place des rĂ©flexes qui freinent la crĂ©ation et le partage dâinfox, avec lâinfographie anti-partage dâinfox.
đšAlerte Ă©dition spĂ©cialeđš
Elle arrive la semaine prochaine et elle te dira tout sur la đformation bootcamp que jâorganise dĂ©but juinđ.
Objectif â te permettre de passer expert en dĂ©tection d'infox santĂ© đ”ïžââïž
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âŹïž
4 âïžâïžâïžâïž = 1 đ§ protĂ©gĂ©
Merci pour votre soutien! đ€
Lâinfox manipule notre cerveau, et nous sommes ses complices
Il y a quinze jours je vous ai proposĂ© de me dire si vous pensiez avoir dĂ©jĂ partagĂ© une infox, en vous doutant quâelle Ă©tait fausse?
Voici les résultats:
PremiĂšrement: merci pour votre honnĂȘtetĂ©! đđŒ
La plupart dâentre vous a donc dĂ©jĂ partagĂ© une infox, ou nâest pas complĂ©tement sur de ne pas lâavoir dĂ©jĂ fait.
Rassurez-vous, câest normal.
â Tout dans lâenvironnement dâinformations moderne nous incite Ă favoriser le partage de lâinfo plutĂŽt que la vĂ©rification de sa vĂ©racitĂ©.
On va essayer de comprendre pourquoi, et comment éviter ça.
(Et merci aux 23% qui pensent ĂȘtre infox proof de continuer Ă suivre cette newsletter, jâapprĂ©cie votre soutien malgrĂ© votre expertise anti infox! đ )
đ Ce qui plait Ă nos cerveaux dans lâinfox
Nous lâavons vu dans la prĂ©cĂ©dente Ă©dition, lâinfox circule Ă la vitesse de lâĂ©clair sur les rĂ©seaux sociaux :
Affirmer une bétise prend deux secondes, alors que de démontrer scientifiquement le caractÚre erronée de celle-ci est beaucoup plus long.
Les infox se propagent plus vite et à beaucoup plus de monde que les faits véridiques ou les contenus de fact-checking.
Nous avons aussi vu que les fausses nouvelles se propagent plus que les vraies parce que les humains, et non les robots, sont les plus susceptibles de les propager.
Ok.
Mais pourquoi donc partageons nous cette infox? đ€
Il y a de multiples études sur le sujet et de multiples raisons.
Il existe aussi une myriade de biais cognitifs exploitĂ©s par les âvraisâ crĂ©ateurs de dĂ©sinformation, avec intention de manipuler et/ou nuire.
Mais aujourdâhui nous nâallons en que lister trois.
Trois raisons pour lesquelles nos cerveaux peuvent produire de la mĂ©sinformation, mĂȘme si nous avons les meilleures intentions du monde :
1- Le biais de confirmation
Notre cerveau est programmĂ© pour rechercher des informations qui confirment nos croyances existantes â câest le biais de confirmation.
Malheureusement cela peut avoir des conséquences positives comme négatives.
Exemple: đ©ââïž Le cas du mĂ©decin pro-vaccination (Ă raison!)
Un mĂ©decin est convaincu que les vaccins sont efficaces et sĂ»rs. Il lâa Ă©tudiĂ©, il en connait les raisons scientifiquement prouvĂ©es sur de nombreux vaccins.
Lorsquâil consulte de nouvelles sources dâinformation ou dâactualitĂ© (sur un nouveau vaccin par exemple), il peut avoir tendance Ă :
retenir prioritairement les articles qui confirment cette idée (par exemple, une étude montrant la baisse drastique de la mortalité infantile grùce aux vaccins),
et Ă©carter ou minimiser les sources qui soulĂšveraient des effets secondaires rares ou des controverses, mĂȘme lĂ©gitimes.
đ RĂ©sultat : son opinion initiale est renforcĂ©e, mais il risque de ne pas percevoir certaines zones de doute ou dâamĂ©lioration (efficacitĂ© variable selon les contextes, enjeux dâaccĂšs Ă©quitable, etc.).
Vous lâaurez jâen suis sĂ»re compris, la dĂ©monstration est identique pour lâavis initial inverse (vaccino sceptique).
Et quand les deux personnes se rencontrent, la discussion peut vite faire des bulles⊠et se révéler impossible.
Le biais en faveur dâune bonne action (ici, la vaccination) peut rĂ©duire la capacitĂ© Ă dialoguer avec des personnes hĂ©sitantes, ou Ă reconnaĂźtre des problĂšmes rĂ©els liĂ©s Ă lâimplĂ©mentation des politiques de santĂ©.
đ Câest le paradoxe : le biais de confirmation nâest pas âbonâ ou âmauvaisâ en soi â câest son effet sur le raisonnement critique qui compte.
2- Lâeffet de vĂ©ritĂ© illusoire
Lâeffet de vĂ©ritĂ© illusoire nous pousse Ă croire quâune information est vraie simplement parce quâelle est rĂ©pĂ©tĂ©e frĂ©quemment.
Exemple: đ§Ž âLe vinaigre, un dĂ©sinfectant naturel efficaceâ
On lâentend partout : âLe vinaigre blanc dĂ©sinfecte aussi bien que lâeau de Javel, mais en version naturelle et sans danger.â
Ce message est largement diffusĂ©, notamment sur des blogs bien-ĂȘtre, dans des groupes zĂ©ro dĂ©chet ou lors dâateliers DIY. Ă force dâĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©, il finit par ĂȘtre cru â mĂȘme par des professionnels de santĂ© ou de la petite enfance.
Mais⊠câest faux ou trĂšs incomplet. Le vinaigre a une lĂ©gĂšre action antimicrobienne, mais il ne tue pas les virus, ni de nombreuses bactĂ©ries pathogĂšnes, et il ne remplace pas un vrai dĂ©sinfectant dans les milieux oĂč lâhygiĂšne est critique (hĂŽpitaux, crĂšches, soins Ă domicile, etc.).
Allez lire lâexcellent article dâOcĂ©ane Sorel sur le sujet, passionnant et vraiment marrant!
đ Ă force de lire et entendre une affirmation, notre cerveau lâintĂšgre comme un fait.
Câest le biais de vĂ©ritĂ© illusoire : notre cerveau assimile la frĂ©quence dâexposition Ă une information Ă un indice de vĂ©racitĂ©.
Malheureusement les consĂ©quences sont concrĂštes: dans le cas de notre exemple, on peut en venir Ă privilĂ©gier ces gestes ânaturelsâ au dĂ©triment de conseils mĂ©dicaux fiables, et des populations fragiles (nouveaux-nĂ©s, personnes immunodĂ©primĂ©es) peuvent ĂȘtre exposĂ©es Ă des risques Ă©vitables.
3- La recherche de résultats
Nos cerveaux humains recherchent des actions qui leur permettent d'optimiser leurs résultats, c'est-à -dire:
de maximiser les récompenses (par exemple la nourriture, l'argent, le pouvoir, les partenaires, etc.)
et d'éviter les punitions (par exemple les efforts, les privations, les frustrations).
Un raccourci mental sâinstalle : âSi ça promet un bon rĂ©sultat et que câest facile, ça vaut le coup.â
Exemple: đœïž Le rĂ©gime miracle
Il promet une perte de poids rapide sans effort:
âBuvez cette boisson brĂ»le-graisse tous les soirs, perdez 5 kilos en une semaine sans faire de sport !âCe type de message sĂ©duit parce quâil joue sur notre tendance naturelle Ă rechercher des rĂ©sultats rapides et gratifiants, tout en Ă©vitant les efforts (la punition) associĂ©s Ă un vrai changement de mode de vie (alimentation Ă©quilibrĂ©e, activitĂ© physique, patienceâŠ).
đ RĂ©sultats:
Adhésion à des régimes restrictifs inefficaces voire dangereux
Dépendance aux promesses rapides (effet yo-yo)
MĂ©fiance croissante vis-Ă -vis des conseils de santĂ© fondĂ©s sur la science, perçus comme âlentsâ ou âpunitifsâ
Sensibiliser Ă ce biais permet dâĂ©clairer pourquoi certains messages de santĂ© âtrop beaux pour ĂȘtre vraisâ sĂ©duisent⊠mĂȘme les plus rationnels dâentre nous.
Notre cerveau cherche la carotte đ„. Ă nous de lui rappeler que la vraie rĂ©compense, câest la durabilitĂ©, pas le raccourci.
Tu as des infox trouvées sur les réseaux à partager?
Ecris moi sur le chat dédié ou envoie moi un email!
đȘLes rĂ©seaux sociaux apprennent de nos comportements
Maintenant que nous comprenons un peu mieux ce quâil se passe dans notre cerveau, voyons comment les rĂ©seaux sociaux y participent.
La structure incitative actuelle des plateformes de réseaux sociaux
â ne rĂ©compense pas les utilisateurs qui partagent des contenus exacts,
â rĂ©compense plutĂŽt le partage de lâinfox.
Pourquoi?
Les rĂ©seaux sociaux sont des structures privĂ©es qui cherchent Ă maximiser lâengagement de leurs utilisateurs.
đ Plus de đ = plus de đ°
La structuration des algorithmes est donc calquĂ©e sur le fonctionnement de nos cerveaux pour favoriser les situations oĂč il va partager / liker / commenter /consulter.
Bref:
Les algorithmes poussent nos cerveaux à consommer les réseaux sociaux
Ils le font de multiples façons, en voici 3:
Les Ă©motions fortes (peur, colĂšre, tristesse, espoir, anxiĂ©tĂ©) favorisent lâengagement â Lâalgorithme pousse le contenu
Le biais de confirmation favorisent lâengagement â Lâalgorithme vous prĂ©sente des contenus qui correspond Ă vos valeurs
Lâeffet de vĂ©ritĂ© illusoire met tout le monde dâaccord sur une infox et favorise lâengagement â Lâalgorithme pousse le contenu
Vous lâavez compris, il nâest pas question ici de favoriser ce qui est vrai.
LâidĂ©e est de favoriser lâengagement des utilisateurs.
Lâalgo voit ce que vous faites et suit le mouvement:
đIl ne pousse pas ce qui est vrai, mais ce qui fait rĂ©agir.
âŒïž Attention âŒïž
Bien sĂ»r je simplifie ici des mĂ©canismes beaucoup plus complexes et qui ont demandĂ© de multiples recherches pour ĂȘtre validĂ©s. Si vous souhaitez plonger plus profondĂ©ment dans le sujet, je vous invite Ă lire lâarticle source indiquĂ© Ă la fin de cette newsletter.
đ Nos cerveaux sont influencĂ©s par ce quâils trouvent sur les rĂ©seauxâŠ
Les algorithmes ne sont pas les seuls Ă ĂȘtre influencĂ©s par nos feedbacks.
â Nos cerveaux đ§ le sont aussi!
Quand on publie sur les rĂ©seaux, on apprend vite ce qui âmarcheâ :
Un post drĂŽle ? đ„ Des likes.
Une info anxiogĂšne ? đ Des rĂ©actions.
On lâa vu, nos cerveaux sont programmĂ©s pour rechercher des actions qui maximisent les rĂ©compenses (argent, pouvoir, reconnaissanceâŠ) et minimisent les punitions.
Sur les rĂ©seaux sociaux, ces rĂ©compenses prennent une forme bien particuliĂšre : likes, cĆurs, partages.
Autrement dit, du feedback social immédiat, visible et quantifiable.
Ce feedback social (likes, cĆurs, partages) devient notre boussole :
on adapte nos contenus pour maximiser les rĂ©compenses (approbation đ â€ïž et commentaires) et Ă©viter les punitions (critiques ou silence)Et comme ce feedback active les mĂȘmes circuits neuronaux que les rĂ©compenses matĂ©rielles, il devient hautement addictif.
đ RĂ©sultat ? on crĂ©e du contenu ou on partage ce qui nous semble, dâaprĂšs ce que lâon voit sur les rĂ©seaux, avoir plus de chances de crĂ©er de lâengagement.
Et devinez quoi ? La vĂ©racitĂ© nâentre pas forcĂ©ment dans lâĂ©quation. đ©
Une info peut faire du bien, rassurer ou donner un sentiment de contrĂŽle, mĂȘme si elle est fausse. Et câest ainsi que des fausses infos bien intentionnĂ©es sont créées et circulent massivement.
⊠et voilĂ la boucle de lâinfox est bouclĂ©e
âčïž SOURCE: cet article est largement inspirĂ© de l'article suivant:
Globig, Laura, and Tali Sharot. "Considering information-sharing motives to reduce misinformation." Current Opinion in Psychology (2024): 101852.
Les clĂ©s đ anti-infox du jour
Il nây a donc pas que les algorithmes qui entrent en jeu âŠ
Nous pouvons donc tous et toutes (oui, mĂȘme avec un bac +10) participer Ă la crĂ©ation et Ă la diffusion de lâinfox santĂ©.
Bien sûr une action réglÚmentaire sur la structuration des réseaux et de leurs algorithmes est plus que souhaitable.
Mais nous pouvons aussi participer Ă arrĂȘter la crĂ©ation et diffusion de lâinfox.
1ïžâŁ La premiĂšre clĂ© đ est de comprendre notre propre rĂŽle de crĂ©ateur dâinfox (tu es abonnĂ©.e aux ClĂ©s, tu es sur la bonne voie!!) .
2ïžâŁ La seconde đ est de repĂ©rer les situations propices pour contre-carrer les pulsions de nos propres cerveaux.
3ïžâŁ La troisiĂšme đ est de dĂ©tecter ces comportements chez les autres avec lesquelles nous discutons ou interagissons⊠et celles que nous suivons sur les rĂ©seaux!
Je vous repartage ici le petit guide de dĂ©cision en image pour aider vos clients, patients, collĂšgues Ă choisir entre partage et non partage des informations de santĂ© sur les rĂ©seaux sociaux âŹïžâŹïž

Câest fini pour aujourdâhui đ„Č
JâespĂšre que ce nouvel opus tâa plu !
Les ClĂ©s reviennent en juin, avec, si tout va bien đ€đŒ, des mini formations et la nouvelle rubrique âla dĂ©tox de lâinfoxâ.
NâhĂ©site Ă cliquer sur le petit coeur đ pour me le faire savoir et Ă laisser un commentaire avec tes feedbacks, idĂ©es et histoires !
Sur Substack, pas dâalgorithme, sois tranquille, câest seulement pour toi et moi đ
A bientĂŽt, prenez bien soin de vous
Super intéressant et agréable à lire